La cimenterie d'Eclépens

Bétonner plus vert

Le ciment est responsable de 8% du dégagement de CO2. Holcim veut remplacer en 2050 la totalité des énergies fossiles pour chauffer ses fours en brûlant des déchets (pneus, résidus plastiques, etc.). Sans oublier le captage du carbone dans le sous-sol.

La cimenterie d'Eclépens souhaite réduire ses émissions de CO2
La cimenterie d'Eclépens souhaite réduire ses émissions de CO2 - Copyright (c) DR
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Sur la sellette lors de l’occupation de la colline du Mormon, Holcim mène à bien une transition vers le « zéro émission nette » pour sa production de ciment : « Construire de façon durable, c’est possible», assure François Girod, le directeur de la cimenterie d’Eclépens (VD). Le constat est là: la demande en béton ne faiblira pas. La société a besoin d’infrastructures à base de béton, notamment pour le transport et le logement dans une Suisse à 9 millions d’habitants. La solution permettant de protéger l’environnement est de produire le ciment de manière plus écologique. Une partie du chemin est déjà faite: les émissions nettes de CO2 par tonne de ciment produit en Suisse devraient s’abaisser de 520 kg à moins de 380 kg en 2030.

Comment? Pour chauffer les fours à 1450°C, les cimenteries recourent de plus en plus à la combustion des déchets non-recyclables plutôt qu’aux énergies fossiles comme le pétrole ou le gaz. A Eclépens, deux halles de stockage de 1500 m3 – essentiellement pour les matières plastiques destinées à être brûlées – sont en construction. C’est le projet Flame qui se bâtit à la place des anciennes citernes à mazout. Devisé à 10 millions de francs, le projet s’accompagne d’une armée de capteurs pour affiner les réglages: «Nous augmenterons la proportion de combustible de substitution de 70 à 95% et éviterons ainsi l’émission de 40’000 t de carbone par année».

Plusieurs façons de capter le CO2

Autre solution bienvenue, le captage du gaz carbonique pour sa réutilisation ou son stockage dans le sous-sol. Le CO2 peut être utilisé pour la production de plantes en serre ou dans des boissons gazéifiées. Il peut être utilisé par conversion avec de l’hydrogène vert pour la fabrication de produits chimiques ou de matières plastiques. Facilement transportable par pipeline après sa captation, il peut être stocké sous terre ou dans des fonds marins.

Le programme de la neutralité carbone et d’un ciment entièrement recyclable pour 2050 a été lancé en 2022, après l’évacuation de la ZAD sur la colline du Mormon voisine de la cimenterie, la première «zone à défendre» de Suisse. La balle est désormais dans le camp du canton de Vaud qui a créé un groupe de travail pour déterminer comment remplir l’imposant trou creusé dans la carrière. Est-ce suffisant pour calmer les esprits? Holcim, qui avait prévu une journée portes ouvertes le samedi 4 mai pour la première fois depuis 2012, a dû y renoncer face aux menaces d’activistes prévoyant des actions sauvages à Eclépens. «Cette décision n’a pas été facile à prendre et va à l’encontre de notre volonté d’ouverture et de dialogue avec toutes nos parties prenantes», concède la direction.

Si la cimenterie est parvenue à baisser ses émissions de CO2 de 10% en deux ans, cela est essentiellement dû au fait qu’Eclépens ne produit plus de ciment Portland pur, en augmentant la part de produits à bas carbone ou de béton recyclé à base de granulats de démolition. Eclépens mise aussi beaucoup sur un nouveau four qui vise à produire du ciment à 800 degrés au lieu de 2000 actuellement. Holcim envisage également des forages souterrains permettant d’étudier le potentiel géothermique profond. Pour l’avenir, la direction table sur une production de 700’000 t de ciment, assez en retrait des 850’000 t d’il y a une dizaine d’années. Bétonner plus vert reste un objectif envisageable pour les années à venir: «La course au ciment neutre est lancée», promet Stéphane Pilloud, directeur de Holcim pour la Suisse romande.